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Les univers des deux comtés Des contes gratuits pour petits et grands

Line et le Chêne

Mestr Tom

Après la guerre du néant, Line quittait le château des fins heureuses où elle avait vécu le temps d’aider le pouvoir à se réinstaller.

 

Aujourd’hui, la terrible fée était passée la voir.

— Line, je sais que vous avez encore des doutes. Mais ma colère et les erreurs de Vivianne ne sont plus. Si je suis la fée de l’ombre, il faut une fée de lumière. Une fée qui respecterait le pacte me laissant le soin des créatures de la nuit. Une fée qui serait mon égale.

— Je peux essayer de vous trouver une telle fée, mais je doute qu’elle existe.

— Détrompez-vous, ma chère, je pensais à vous.

Line ne rêvait pas, C., qui l’avait connue apprentie fée, la considérait comme son égale.

— Afin de sceller ton pouvoir, tu devras t’asseoir sur le trône du grand chêne, en portant le bâton de Viviane.

— Merci de votre confiance, majesté.

La terrible fée lui murmura un nom à l’oreille.

— Tu connais mon nom, désormais, alors appelle moi C. Nous allons travailler ensemble, en parfait équilibre.

Line resta ébahie. Elle partit voir Roi et Lilith, pour leur annoncer son départ.

 

Une fois au grand chêne, elle ouvrit l’arbre qui l’avait vu naître. Ce dernier avait été fermé après le départ de la grande fée pour l'île des temps oubliés. Il faudrait convoquer les fées et faire le ménage, car la poussière s’était accumulée pendant les siècles d’inoccupation. Elle regarda l’atelier de couture de Lebo avec nostalgie, son amie n’était pas revenue du néant.

 

Elle se rendit dans la grande salle et entendit pleurer, elle demanda qui se trouvait dans le chêne avec elle. Un jeune garçon sortit de l’ombre.

— Je m’appelle Tristan. Je ne sais pas comment je suis arrivé là, j’étais parti lire dans ma chambre pendant que mon frère et ma sœur se disputaient. Marc a dit à ma sœur que c’était une géante et que, si elle mangeait trop, elle passerait plus les portes. Elle a voulu se venger, j’ai pris une baffe perdue, donc je suis parti dans ma chambre, les laissant se battre.

— Je suis Line, la fée des chats. Tu es dans le grand chêne, l’ancien palais des fées. Si tu es là, c’est que le Professeur estime que nous pouvons t’aider. Quand tu rentreras chez toi, il ne se sera passé qu’une minute ou deux.

Tristan se précipita vers la fée à la queue et aux oreilles de chat, et lui fit un câlin.

— Bon ! La première étape, c’est de trouver le sceptre des fées, il va falloir chercher un peu partout.

 

Ils passèrent une bonne partie de la journée à fouiller le palais, mais il n’y avait aucun sceptre nulle part.

— Je connais un ami qui pourra nous aider, le mage champignon. Allons le voir !

Line se dirigea dans un couloir étroit qui se terminait par une porte minuscule.

— C’est un raccourci.

Sans qu’il s’en rende compte, Tristan avait changé de taille.

 

Quand il passa la porte, il se retrouva en pleine forêt, et pas plus grand qu’une fourmi. Un loup passa au-dessus d’eux. Tristan fut impressionné par la majesté de l’animal. La peur de cette bête lui était, par contre, étrangère.

 

Ils arrivèrent au village et ils furent introduits devant le mage et la reine des lutins. Ceux-ci parlaient un langage composé de cinq syllabes qui servait à décrire tous les mots du quotidien. Les lutins mélangeaient le langage commun et le leur, quand ils s’adressaient à un étranger.

— Lo zot fée est là Frot Zot Reine à Lo.

— Ma chère Line, j’ai appris que vous avez été libérée du Néant !

— Oui, votre seigneurie.

— Frot Bien Frot Bien et qui est Lo Garçon ?

— Tristan, il m’aide dans ma quête pour ramener les fées. Je dois retrouver le bâton de Viviane.

— Lo Chemin Frot dur Zlot et Lo guerrier.

— C’est Tristan mon chevalier.

— C’est Lo Zot Guerrier Tristan qui passera l’épreuve.

— Je fais de l’aïkido, je suis le calme avant la tempête.

— Des créateurs de passage m’ont parlé de Lo aïkido. L’un deux à laisser un Hakama qui, selon lui,  avait de grands pouvoirs. Mais je n’en ai trouvé aucun. Moera, ma petite fille, va aller te Lo chercher.

— Merci, votre seigneurie, répondirent ensemble Line et Tristan.

La petite fille, qui portait de longs cheveux roux et une couronne de tresses, remit l’habit à Tristan qui le revêtit. Un guerrier apporta un sabre en bois et mit genou à terre pour le tendre à Tristan, qui le remercia. Line reconnut les armoiries de l’empereur Rakugo du Soleil Levant. C’était donc un cadeau impérial.

— Maintenant Lo Zot guerrier Tristan est prêt. Frot Zlot fête peut commencer.

Chez les lutins champignons, la journée servait aux travaux du village et à la préparation du repas du soir, que l’on prenait en commun. C’était le moment de régler les disputes et les conflits. Les enfants aidaient aux services et jonglaient, chantaient, jouaient de la musique avec les adultes.

 

Line montra ses pouvoirs et se changea en chat rose. Tristan se sentit obligé de faire une démonstration. Trois guerriers l’attaquèrent. Pour chacun d’eux, il se servit de l’attaque de l’adversaire pour le mettre à terre et le neutraliser. Il fut applaudi par toute l’assistance. Le mage et la reine se levèrent pour l'acclamer.

 

Après la soirée, la jeune Moera l’emmena dans l’une des chambres. Le lit était fait de paille et semblait peu confortable. Voyant la tête du jeune garçon, la jeune lutine ne put s’empêcher de préciser :

— Nous avons tous le même lit, ici, aucune différence n’est faite. Seuls Lo malades ont un Frot confort dans la tente de Lo Zot  guérisseur. La reine dort dans un lit comme ça.

— Merci, répondit Tristan, gêné.

Il fit un câlin à la lutine qui rougit. Ce fut à son tour d'être gênée. Elle partit, laissant Tristan prendre un sommeil réparateur.

 

Moera accompagna son grand-père et la Reine, pour dire au revoir à Line. La Reine lui confia deux potions. Moera serra Tristan très fort dans ses bras, car c’était, sans nul doute, la dernière fois qu’ils se verraient. Les lutins champignons vivaient une année, ou deux pour les plus chanceux. Elle donna un baiser sur la joue de Tristan. Celui-ci, fort étonné, n’eut pas le temps de réagir.

Line se transforma en chat, cette fois-ci de taille normale, sauf qu’elle était rose et possédait deux ailes de cristal.

— Monte sur mon dos. Le mage vient de me dire que le lieu de l’épreuve serait décidé par le gardien de la forêt, il nous attend sur la montagne des aigles. Avant, nous allons passer au lac magique. Le puits sur ce lac te donnera un objet utile pour ta quête.

Tristan monta sur le dos du chat et vit une corde enroulée dans le collier, qui permettait de se ternir et de maintenir les pieds, comme dans des étriers.

 

Le voyage fut bref mais intense. Le jeune garçon avait l’impression de se trouver dans un grand huit. Il put tout de même admirer les peuples de l’herbe, dont il ne pouvait que soupçonner l’existence, vu sa taille habituelle. Une fois arrivés au lac, Line lui fit boire la potion, et Tristan retrouva sa taille normale. La fée lui montra une barque.

— Tu vas devoir ramer seul jusqu’à l’ile. Là, tu trouveras un puits avec une chaine en or. Tire sur la chaine, le puits te donnera un objet qui nous aidera pour notre quête.

 

Tristan peina pour arriver jusqu’à l’ile. Ramer est très sportif, surtout quand on n’en a pas l’habitude. Il se découragea plusieurs fois, mais, arrivé au milieu du lac, il vit que revenir à la berge serait aussi épuisant, alors il continua.

 

Une fois arrivé sur l’ile, il se coucha à terre, les bras en croix, et se reposa un instant. Il partit ensuite vers le puits. La chaine en or lui amena deux sifflets : sur l’un, il y avait marqué Marc, sur l’autre Francesca. La fée, à l’aide de ses pouvoirs, ramena la barque et le jeune garçon au rivage.

— C’est plus facile quand tu es aux commandes.

— Cet objet te sera très utile. Le puits n’apporte ses faveurs qu’à ceux qui le méritent.

Tristan sourit à la fée et lui fit un câlin.

 

La prochaine étape était la montagne des aigles. Là encore, les lois de l’équilibre interdisaient l'ascension par les pouvoirs magiques, et il fallut aux deux compères monter les 4000 marches qui menaient au royaume des aigles.

— Line, qui sont les gardiens ? demanda Tristan, à bout de souffle.

— Ce sont des animaux, qui ont été choisis par la grande fée, il y a longtemps, pour l’aider dans les tâches de préservation de la nature. Ils sont cinq. Seul le gardien du feu est toujours le même, les autres ont changé avec les âges.

— Je vois. Et c’est le gardien du feu qui va te rendre le bâton ?

— Oui. D’après les lois de l’équilibre, je vais devoir passer une épreuve pour le récupérer, mais je dois choisir un chevalier.

— Et c’est moi ?

— Oui. Si la magie t’a présenté à moi, c’est pour une raison. Cela doit aussi résoudre le souci pour lequel tu es venu.

Tristan pensait que, justement, le souci qu’il avait, c’était d'être dans ce monde.

 

Ils arrivèrent sur une grande place, où un jeune garçon habillé en noir, avec des ailes de chauve-souris, les attendait.

— Colin, c’est toi le nouveau gardien de l’ombre ?

— Oui, dame Line.

— Félicitations !

— Merci.

Tristan se plaça au centre de la place. Devant lui, arrivèrent un loup albinos,  qui se coucha au sol, puis un aigle majestueux sur un arbre. Malgré cela, il restait une place énorme autour d’eux.

— Line, la dame des eaux s’excuse de ne pas pouvoir être là mais elle reste à surveiller le détroit. Le seigneur du feu va arriver.

— La dame des eaux est une baleine blanche, murmura Line à Tristan.

 

Soudain le ciel s’obscurcit et un souffle gigantesque faillit emporter Tristan. La fée se mit derrière lui pour le retenir. L’enfant leva les yeux au ciel et vit une ombre gigantesque.

— Mais, c’est… Mais c’est … balbutia-t-il.

— Oui, le gardien du feu est un dragon.

— C’est incroyable !

Le dragon se posa au milieu de ses trois compères. Colin, qui devait avoir le même âge que Tristan, semblait minuscule à côté du grand lézard.

— Bonjour à tous. Line, as-tu ton chevalier ?

— Majesté, je vous présente Tristan, un créateur.

— Je vois, il n’a pas d’armure ?

— Il connaît des techniques de combat venues d’une autre contrée, celles de votre cousin MaihrGran.

— Soit, j’espère qu’il passera les épreuves avec succès.  La première a été concoctée par Colin.

Tristan vit arriver un monstre noir, avec de longues griffes et des yeux rouge flamboyant.

— Voici Plakar, spécialiste des terreurs nocturnes. Son frère jumeau, Soulhli, n’a pas pu venir.

Tristan resta de marbre, et il attendit le bon moment. Il se servit de l’attaque du monstre hurleur, pour le mettre à terre. Il plaça ensuite la lame de son sabre contre le monstre, pour l’immobiliser.

Le monstre disparut.

 

Tristan souffla. Un loup gris géant apparut. Le jeune garçon serra fort son sabre. Le loup grognait, mais n’attaquait pas. L’enfant réfléchit. Il vit que le gardien de l’ombre s’était assis et que l’aigle regardait l’animal avec insistance. Il comprit qu’une deuxième épreuve avait commencé. Il mit son sabre en bois à terre, et se pencha vers la fée des chats.

 

La fée sortit une bouteille de son sac. Elle la tendit à Tristan et le jeune garçon la récupéra. Il s’approcha de l’animal, sans le regarder dans les yeux, puis il versa du lait dans un bol et l’offrit à la louve. Celle-ci lapa le lait avec bonheur. Tristan, calmement, se pencha vers elle, et la louve enceinte lui fit un câlin.

 

Pour la troisième épreuve, le loup lui offrit de répondre à une énigme. Il fit apparaître trois gobelets : l’un en bronze, l’autre en argent et le dernier en or.

— La clé de la dernière énigme n’est pas sur le premier, pas en dessous du deuxième et le troisième n’assurera pas ta victoire. Sous quel gobelet est la clé ?

Tristan réfléchissait, mais il ne trouvait pas. Aucune des propositions ne semblait indiquer quel était le bon. Son jeune frère avait bien des défauts mais, à chaque fois que Tristan avait un souci chez eux, Marc venait à la rescousse. Tristan aurait voulu que son frère soit là. Il repensa aux deux sifflets et souffla dans celui portant le nom de son frère. Marc apparut, surpris.

— Bon, Marc, je te résume : nous sommes dans un pays imaginaire, et je dois réussir une énigme pour sortir de là. C’est comme dans un jeu vidéo, les boss sont derrière moi. Le loup a posé une énigme. La clé de la dernière énigme n’est pas sur le premier, pas en dessous du deuxième et le troisième n’assurera pas la victoire. Sous quel gobelet est la clé ? As-tu une idée ?

— C’est un mauvais choix, car l’or c’est mieux, mais la clé est sous le gobelet en bronze.

— Tu en es sûr ?

— Oui, j’ai dû voir un truc comme ça sur YouTube : il te dit que la clé n’est pas sur le premier gobelet, mais ça ne veut pas dire qu’elle n’est pas en dessous.

Tristan souleva le gobelet en bronze et trouva la clé.

— Bien, jeune humain, déclara le dragon d’une voix caverneuse. Tu as demandé de l’aide, et, de l’aide, tu auras besoin…

— Dites, vu que je suis là, y aurait un truc de plus costaud ? En plus, j’ai mes nouvelles Air Max et, franchement, elles sont trop belles. Un truc de super sportif !

— Si tel est ton souhait...

Le dragon souffla et Tristan se retrouva attaché en haut d’un mur.

— Jeune humain, tu devras libérer ton frère avec la clé.

Marc eut beau essayer de grimper, il ne réussit pas à atteindre ne serait-ce que le rebord du mur. Il chercha une solution, mais aucune vidéo YouTube ne pouvait l’aider, sur ce coup-ci.

 

Tristan, du haut de son mur, voyait le désarroi de son jeune frère, mais aussi celui de Line à qui il manquerait une épreuve pour avoir son bâton.

 

Soudain, il vit le sifflet qui était tombé de sa poche.

— Marc, le sifflet à ta gauche. Souffle dedans, tu trouveras la solution.

Le jeune garçon ramassa le sifflet et s'exécuta. Francesca apparut.

— Je fais quoi ici ?

— Tu nous aides. Tristan est dans un jeu vidéo, il y a le boss qui l’a monté là-haut, et je n’arrive pas à le faire descendre.

— J’ai pas tout compris, sauf que si je n’étais pas là, vous seriez encore dans la mouise.

La jeune fille essaya de monter en haut du mur, mais il était encore trop haut.

— Allez, Marc, on va voir quel sportif tu es. Et tu vas découvrir qu'être grande et forte peut avoir un gros avantage.

Francesca aida son frère à grimper en haut du mur. Ce ne fut pas simple pour les deux, car les chaussures de Marc, bien que très jolies, glissaient sur le mur et Francesca devait quasiment le porter à bout de bras.

 

Le jeune garçon arriva enfin en haut du mur et leva les bras au ciel, en champion. Tristan remercia sa sœur. Marc délivra son grand frère et, d’un souffle du dragon, le mur rentra dans le sol.

— Ça tremble comme un ascenseur, la sécurité en moins !

— Était-ce assez sportif pour toi, jeune humain ?

— Euh, oui ! Merci, Monsieur le dragon.

— Bien, je crois que vous avez trouvé ce que Tristan cherchait. Loin de vos disputes pour des broutilles à trois, vous pouvez vaincre des murs et déplacer des montagnes. Line, je suis heureux de te remettre le bâton qui me fut confié par Viviane, avant son départ. Tu es désormais la grande fée.

— Je suis, avant tout, la fée des chats. Avec C., nous sommes la Grande Fée !

— Bien et qu’il en soit toujours ainsi.

Ce fut alors le moment des adieux. Tristan enlaça Line pour un dernier câlin, puis son frère et sa sœur.

 

Ils fermèrent les yeux, et ce fut le retour à la maison. Les trois enfants avaient vécu une merveilleuse aventure. Mais il fallait aller en cuisine, il y avait un gâteau à préparer, et un joyeux anniversaire à souhaiter pour les treize ans de Tristan.

 

Mestr Tom © Creative Commons BY SA

 

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