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Les univers des deux comtés Des contes gratuits pour petits et grands

Les voleurs

L’ancien vampire aimait la chasse. Il avait faut plusieurs bonnes prises et les sorcières, toutes contentes d’avoir un prince vampire, l’avaient payé grassement. Il faudrait qu’il se fasse oublier un certain temps par Vanceslas, mais la récompense en valait la chandelle. Il avait réussi à recevoir, pendant un mois, le pouvoir d’une des gardiennes de Mère sorcière, une magicienne de haut rang.

 

Il se prépara pour la chasse. Il vit deux jeunes garçons arriver sur le pont du troll. Il se mit à couvert dans le maïs. Étant un allié des sorcières, il ne craignait pas les créatures qui y rôdaient. Les garçons parlaient des coups de bâtons que le plus grand avait pris, suite à un achat malheureux qu’il avait effectué.

— Dépenser ta paye en billets de tombola, déclara le plus jeune, c’était pas une bonne idée !

— Il y avait un jambon à gagner, et pas de perdant !

— On a eu que des navets, et toi une volée de bois vert en prime.

— Je suis au courant ! J’ai dormi sur le ventre deux jours ! J’ai eu une vieille flûte, aussi.

— Il y a des copains, à l’école, qui disent que, dans le comté de la nuit, on peut devenir riche …

— Surtout morts ! Trolls, vampires, hommes-garous, sorcières … voilà la population !

— On raconte que le cœur d’une gargouille peut rendre immensément riche !

— Et que personne n’en a jamais ramené, car la gargouille meurt mais ses sœurs te découpent en tranches ...

— À ce qu’il parait, au château, seraient gardés les cœurs des anciennes gargouilles. Une vraie fortune ...

— L’endroit le mieux gardé et le plus dangereux du royaume ! Et pour y parvenir, il faut traverser tout le comté de la nuit ! Tu es sûr de toi ?

— Quand on veut être sûr de soi, on plante des navets ...

— Très spirituel !

— J’ai pris quelques petites choses, dans ma besace, pour nous sortir de mauvais pas …

— Pas vraiment fait pour me rassurer !

— Il fallait bien trouver une solution. Ta paye seule ne suffit pas. Nous n’avons plus le choix ! Pas envie d'être vendu à un cirque. Pourquoi m’as-tu suivi ?

— Avec les monstres, j’ai une chance. Mais si tu t’enfuis, c’est mon postérieur qui va prendre.

Des chercheurs de trésors, comme c’était intéressant. Ils parlaient d’un jeune frère, qui était resté endormi à la maison. Cela serait utile au chasseur. Il allait lui falloir du temps.

 

Il jeta un sort d’illusion, changeant le chemin du château et les envoyant vers le manoir des trois vampires idiots. Cela les occuperait un moment. Il sonda leur mémoire et trouva le nom de leur frère. Le chasseur utilisa un autre pouvoir utile des sorcières, l’envol de l’esprit. Il était désormais interdit de passer le pont de Troll mais, avec ce sortilège, il était facile de duper un esprit simple pour lui communiquer l’emplacement d’un trésor, d’une princesse à sauver ou un jouvenceau perdu. Tout cela n’avait pour but que de leur faire passer le pont et de les envoyer dans un piège …

Les deux frères avançaient prudemment.

 

Soudain un loup noir, gigantesque, apparut devant eux, ses yeux étaient rouges braises. Le cadet chercha dans sa besace et sortit deux gros steaks, qu’il lança vers la créature : le loup était occupé.

— On fait quoi maintenant ?

— On court !

Ainsi fut fait.

 

Une fois hors de danger, les deux frères avaient repris leur souffle.

— Tu les as trouvés où ?

— Pris à l’école, dans la cuisine des maîtres …

— Mon frère est un voleur !

— Un emprunteur ! Je leur rendrai avec l’argent du trésor.

— Il est pas encore gagné, ton trésor ...

L’allée des gargouilles approchait : douze monstres de pierre, sur leur piédestal, gardaient le chemin du château. Les enfants retirèrent leurs sabots. Le cadet regarda avec convoitise le diamant qu’elles avaient sur le front.

— Pas ceux-là, c’est trop dangereux !

— Je sais ! Arrête de jouer les grands frères !

C’est avec soulagement que les garçons arrivèrent sur la place du château. L’ainé remarqua une cage immense, avec l’inscription « Voleur » gravée sur un morceau de bois. L’aîné déglutit avec peine. Il aurait dû convaincre son frère de rester dans le comté des fins heureuses.

 

Devant le pont levis du château, se trouvaient trois hommes, fort bien habillés, portant une cape noire garnie de rouge.

— Et là, tu as quoi ?

— Des colliers d’ails …

— Y a que les enfermeurs de mots qui pensent que les vampires craignent l’ail. Il faudrait au moins un bataillon, une épée en argent ou une fronde ...

— Tu veux faire quoi avec une fronde ?

— Regarde !

L’ainé commença par viser le plus loin qu’il put, vers la gauche.

— J’entends bruit par-là, moi aller voir, déclara l’un des vampires.

— Et un de moins, murmura Dylan.

Le jeune garçon prépara sa fronde et visa en direction des vampires. Il attendait, retenant son souffle.

 

Au bon moment, il visa et toucha l’un d’eux à l’arrière du crâne.

— Pourquoi toi frapper moi, imbécile ?

— Je n’ai rien fait, idiot !

— Igor est parti, nous sommes seuls, abruti !

Les deux vampires furent trop occupés à se battre pour voir les deux frères entrer dans le château.

— Il faut trouver la salle du trésor, déclara Mathis.

— Surtout sortir vivants ... On prend quelques objets précieux et on file d’ici.

Ils suivirent le tapis de velours rouge jusqu’à une porte.

— Regarde les gargouilles, au-dessus de la porte, elles sont en bois. Par contre, leurs diamants sont des vrais !

Chacun sortit son couteau de sa besace et s’ingénia à défaire les diamants. Puis ils se dirigèrent vers la sortie. Dylan écouta au loin et fit signe à son frère de le suivre.

— On va passer par les cuisines, ce sera plus prudent.

 

À pas de loup, les deux frères traversèrent les cuisines, heureusement vides, pour sortir par une petite porte sur le côté du château. Le retour fut étrangement calme.

 

Pendant que son illusion fonctionnait à merveille, le chasseur avait envoûté le plus jeune des frères. Il l’avait fait sortir de chez lui, encore endormi, en chemise de nuit, puis il l’avait guidé jusqu’au pont. Il ne restait plus qu’à prendre l’enfant sur son cheval et à attendre le retour des deux plus grands.

 

Ils passèrent rapidement devant le vampire, sans faire attention à lui, tout à l’aubaine des faux diamants qu’ils avaient récoltés. La poursuite commença. Voyant qu’il n’arriverait jamais au pont à temps, le plus grand hurla :

— Dans le champ de maïs, cachons-nous !

Les deux frères s’enfuirent dans la végétation. Rendant, pour le chasseur, la poursuite plus ardue.

Le vampire mit son cheval à un mètre d’eux.

— Vous pensez vous cacher dans ce champ longtemps ? Le démon du maïs n’apprécie pas les visiteurs, pas plus que ses fils, les épouvantails des sorcières. Ils savent que vous allez finir dans le chaudron de leurs maîtresses. Ils vont arriver.

Dylan et Mathis regardaient partout autour d’eux, complètement terrorisés.

— Je vous laisse imaginer la torture prévue pour les humains qui dérangent le maïs ...

Les enfants tremblaient de peur.

— J’ai un dernier argument, qui devrait vous faire sortir !

Le chasseur souleva sa cape et on put voir un jeune garçon de 7 ans, cramponné au chasseur, tremblant de peur.

— Alhone, dit bonjour à tes frères !

— Bonjour, murmura le petit garçon en pleurant.

— Si vous ne voulez pas qu’il lui arrive malheur, sortez des maïs !

Les deux garçons se regardèrent, et se dirigèrent vers le chasseur.

Il leur prit leur besace.

— Je vous rassure, les diamants sont faux. Je vous traque depuis que vous avez passé le pont. Le château de l’illusion ! Un pouvoir bien utile pour capturer les voleurs. Le vrai château est à trois jours de marche, plus au sud.

Il fit descendre le plus jeune de son cheval et attacha les poignets de chacun à une corde.

— Nous allons faire un petit tour. Je fais toujours une ballade avec mes prisonniers. Les acheteurs sont prévenus et voient la marchandise. Je me demande qui va vous acheter ! Les sorcières, les vampires, les loups … vous échappez aux trolls et aux ogres, ils ne connaissent pas l’utilité de l’argent et n’ont rien à offrir. Les gargouilles, par contre, feront peut-être une offre ...

Les enfants pleuraient et tremblaient. La marche fut longue et ardue, le long de la route. Les deux grands virent, au loin, le vrai château, beaucoup plus grand et plus imposant.

 

 

 

 

 

Alors qu’ils étaient épuisés et qu’ils devaient soutenir Alhone, qui ne pouvait plus marcher, le chasseur entra dans la forêt. Il toucha une pierre à son collier et une cabane apparut.

 

Il poussa les trois frères à l’intérieur. Il les enferma dans une cage humide et malodorante.

— Comment tu es arrivé ici ?

— J’ai suivi la musique, et le monsieur, il m’a dit que vous étiez en danger, alors je l’ai suivi.

— Maman t’a toujours dit de ne pas suivre les inconnus.

— J’ai peur !

— Qu’allons-nous faire ?

— Si j’avais ma besace, j’aurais pu crocheter la serrure.

— Tu peux lui demander de te la donner …

— Très marrant !

L’ainé prit un chiffon et le trempa dans le bol d’eau froide posé à leurs pieds. Il en passa sur le visage d’Alhone et tenta de le rassurer.

—  T’inquiètes pas, c’est comme quand maman nous gronde. On a fait une bêtise, on va être punis, mais, après, tout va aller mieux. !

— Mais je veux pas être puni moi !

— Ah ça ! On choisit pas. On a fait une bêtise, on aurait dû rester dans notre chambre. On va être punis, ça c’est sûr !

— Tiens, je t’ai apporté ça !

Alhone tendit à son grand frère sa petite flûte de cuivre.

— Merci, je vais pouvoir en jouer. Si ça pouvait nous transformer en fantôme le temps que nous partions d’ici ! Ça doit être pratique d'être un fantôme, parfois. Je pourrais espionner les gens et faire guide d’aveugle aussi, ça rapporterait plus d’argent qu’apprenti.

L’ainé remarqua une inscription sur la flûte. Il frotta avec son chiffon.

— M...E.Z

 

Un homme, habillé en chevalier noir, apparut. Il portait devant lui le symbole des paladins, les plus grands chevaliers du royaume. Mais aucun ne portait une armure noire, dans le souvenir des garçons.

— Mezariel le banni, jeune homme. Je fus banni des Paladins pour l’amour d’une fée. Je peux exaucer l’un de vos souhaits. Choisissez bien.

— Nous voulons rentrer chez nous.

— Bien ! Qu’ainsi fut fait !

Le chasseur, qui avait entendu du bruit dans la cage, s’y dirigea. Ses proies avaient disparues. Il les chercha, mentalement, dans le comté de la nuit, mais vit qu’un sortilège les avait ramenés chez eux.

 

Le chasseur ne s’en inquiéta nullement. Les enfants avaient encore faim et, tôt ou tard, ils allaient revenir ! Et là, il les aurait ! Ce n’était qu’une question de temps pour que ces trois-là finissent à son tableau de chasse.

 

Mstr Tom © Creative Commons BY SA

 

 

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