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Les univers des deux comtés Des contes gratuits pour petits et grands

Les baladins fin

Oriane, voyant son cristal devenu noir, se rendit compte qu'elle ne s'était pas rendue depuis longtemps au royaume des deux comtés.

La jeune fille, devenue grande, était passée à autre chose. De plus, le succès de sa web-série, « Kaliderson », lui prenait également pas mal de temps.

Un soir, après un tournage plutôt fatigant, elle remarqua que le cristal s’était illuminé de nouveau. Afin de voir ce qu’il se passait dans le royaume, par curiosité, elle mit le cristal sous son oreiller.

 

Une fois arrivée au royaume, elle se retrouva sur une colline surplombant la mare des sorcières.

Elle vit un homme habillé d’une grande cape noire, avec des cheveux blancs, une barbiche et la fameuse broche des baladins.

 

— Bonjour ?

— Salut Isabeau !

— Je ne vous reconnais pas, monsieur…

— Oh… Je suis Mesraël ! C’est vrai que j’ai un peu vieilli, mais tu aurais pu me reconnaitre.

— Mesraël… Cela fait une éternité que je ne vous ai pas vu !

— Et moi donc ! Pour toi, seulement une année ou deux sont passées. Pour moi, plus de mille ans se sont écoulés. Regarde… Les personnes que tu vois là-bas…

 

 

Oriane regarda dans la direction que lui indiquait le guerrier.

Elle vit une vielle dame avec un chignon impeccable, vêtue d’une tenue de sorcière élégante, et trois autres personnes, dont une petite fille.

 

— Je les vois. Dis-moi… Qui sont-elles ?

— Tu as ici : ma femme, la sorcière Mama Yaga ; ma fille ; notre petite fille et Mertille notre arrière-petite-fille.

 

Oriane n’en revenait pas.

 

— Tu as eu une fille avec la sorcière ?!

— Oui, mais je ne l’ai pas vu grandir. Après que Dagreb soit devenue la mère des sorcières, ma fille Morgianne a pris sa succession. Elle est devenue la plus puissante des mères des sorcières. Garante du triumvirat. La guerre, lancée après le départ de C., entre les hommes garous, les vampires et les sorcières, a duré longtemps. Du côté des fins heureuses, on a appelé ça « l’Age d’Or ». Moi, je ne l’ai pas connu. La grande fée n’a pas supporté que je lui tienne tête, que je veuille sauver ma femme et ma fille de son ordre du génocide des sorcières. J’ai été emprisonné dans la lampe du djinn pendant près de cinq cents ans. Puis, libéré, je pensais pouvoir atteindre le paradis ou, au moins, un certain calme, voire retourner au royaume des deux comtés. Il n’en fut rien. J’ai été enfermé dans le néant. Là-bas, les années comptent double. Seul le souvenir de ma femme et l’espoir de revoir ma fille m’ont sauvé de la folie.

— Je vois…

— Ensuite, je suis revenu à la fin de la première guerre du néant : mes frères m’ont ramené à la vie. Leur amour pour moi a été tellement fort que j’en suis sorti. Ils furent aidés par le Professeur qui se fait appeler désormais l’Archiviste.

— Je vois… Il s’est passé beaucoup de chose depuis mon dernier voyage.

— Oh oui… Mille ans. La Terrible Fée est tombée et la Grande Fée a pris sa retraite. Il y a eu des guerres : la guerre sombre, la guerre du néant… Et là, vois-tu ? Là où tu nous as quittés (près de la frontière des ogres), tu trouveras le néant. Il est de retour. Mais, cette fois-ci, il a été plus malin. Il s’est réincarné dans des monstres qui ne voulaient ni du nouvel ordre établi, ni de cette paix entre le comté de la nuit et le comté des fins heureuses. Voici où nous en sommes… A l’Ouest, dans les fins heureuses : Roi le conteur dirige le comté des fins heureuses  ainsi que le royaume. Il a une reine Lilith, qui fut un temps la reine des cauchemars et sa fille, la princesse Chrysanthème, qui vit la plupart de son temps dans une petite masure de la forêt, avec sa suivante Ermeline comme seule compagnie. A l’Est, dans le château des cauchemars C. a reprit son rôle de souveraine. Elle est aidée par son fils Colin, qu’elle a retrouvé après la première guerre du néant. Il est l’ambassadeur de l’ombre auprès du grand chêne. Il n’est plus dirigé par Viviane, l’ancienne Grande Fée, mais par Line, la Fée des chats. Voilà où nous en sommes… Et dans l’ancien château de l’ogre Mathéo, se trouve le néant et sa compagne. Nul ne l’a vu, on sait qu’elle se fait appeler Tenant. Le Néant a cinq généraux pour l’aider : la Reine Des Neiges, le joueur de pipeau, le nain Tracassin, Tenant et l’ignoble Chester. Justement, ma mission était de m’aventurer dans le pays des ogres et d’essayer de trouver qui a rejoint cette sombre armée.

— Et ta fille ? demanda Oriane.

— Ma fille ne sait pas que je suis revenu. De plus, c’est pour éviter une nouvelle révolte afin de remplacer les chefs de clans par leur fils. Ainsi, celle que tu vois, la plus âgée, est ma petite fille Khèty. Elle est mariée à Loukhi, le chef des homme-garous et ils ont une fille : Mertille. Celle que tu vois aux cheveux blancs. Son parrain n’est autre que Stanislas, le nouveau prince des vampires. Pour les anciens : Galthédoc, Vanceslas et ma fille ; la Terrible Fée leur a redonné leur âge d’enfant afin que l’équilibre soit préservé. Ainsi, ma fille a le même âge que Mertille. Elles sont toutes deux copines de classe dans l’école du Nécromancien. C’est l’un des nôtres. C’est un espion des baladins. Il est ici dans le monde du néant afin de nous ramener le plus de renseignements possibles.

— Je vois… Mais tu ne veux pas rencontrer ta fille ?

— Non. J’ai revu ma femme dans sa cabane. Elle m’a donc prévenu pour ma fille, mais que dire ? Que dire d’un père qui a été absent depuis des années ? Suis-je réellement son père ? Ou juste son géniteur ?

— Mais le fait qu’elle soit redevenue jeune ne te donne-t-il pas une deuxième chance ?

— Peut-être. Un jour, je verrai. Me suivras-tu dans ma quête ? Si je dois m’enfoncer dans la limite de la zone du néant, je veux être accompagné de la meilleure guerrière et de la meilleure archère que j’ai connue dans les royaumes. Toi !

 

Oriane n’en croyait pas ses oreilles. Pour la première fois, Mesraël avait de l’intérêt pour ses talents de combattante, de la bienveillance à son égard. Elle n’était plus la petite, elle n’était plus que la femme, elle n’était que son alliée le plus précieux pour aller aux confins du royaume. Celle sur qui il pouvait s’appuyer et aller jusqu’au plus noir de l’imagination 

 

— Allons là où l’imagination n’existe plus. Mon épée, mon arc sont tiens. Je te suivrai.

— Bien ! Allons-y, dit discrètement le grand guerrier, essuyant une larme coulant sur sa joue.

 

Ils partirent alors pour le Nord, la zone des ogres, la zone du Néant. Soudain, ils entendirent un rugissement bestial près d’eux. Oriane prépara son arc et Mesraël sortit son épée. Ils virent un lion immense qui ne semblait pas en grande forme car il sanglotait. L’aventurière s’approcha de lui. Le lion avait un bout de clôture planté dans l’une de ses pattes.

Oriane le lui retira avec prudence et gentillesse. Le lion hurla. Mais quand la douleur passa, il donna un coup de langue à l’archère.

— Merci ! Mais j’ai déjà pris ma douche, ce matin.

— Désolé, petit d’homme. Je suis Robin, le lion de mémé. Les gens ne sont pas sérieux, ils jettent tout dans la nature. Je n’ai pas fait attention où je marchais et je me suis blessé. Quelle est cette chose qui brille sur ta poitrine ?

— Je suis Dame Isabeau et je fais partie des paladins.

— Je ne connaissais pas les paladins mais ton costume est curieux. En général, les femelles  mettent des robes et volent sur des balais. Que viens-tu faire par ici ?

— Nous cherchons des renseignements sur les nouveaux habitants du château.

— Ah, eux ! Je peux vous accompagner un moment, pour te remercier.

Robin suivit les deux aventuriers, jusqu’à ce qu’ils tombent sur une troupe de chats noirs aux yeux rouges. Oriane recula devant la laideur de ces monstres.

— Ce ne sont pas des félins, déclara Robin de sa voix grave. Ne vous fiez pas à leur apparence. Ce sont des créatures de l’Autre, sous les ordres de ce traitre de Chester.

— À trois contre cent, nous allons avoir du mal, hurla le paladin.

— Je vais vous faire passer sur mon dos, lui répondit le lion. Montez et surtout accrochez-vous bien.

Les aventuriers montèrent sur le dos de l’animal, qui s’était allongé pour leur faciliter la tâche. Ils s’accrochèrent à la toison de l’animal, qui se leva doucement.

— Bien accrochés ?

— Oui Robin, merci. Bonne chance

— Merci, et vous, bonne chance à vous. Méfiez-vous de tout le monde.

Le lion prit son élan, pendant que les aventuriers, arme au poing, tiraient dans le tas de sales matous. Une fois éloignés des horribles félins, Oriane et Mesraël descendirent du fauve géant.

— C’était impressionnant, merci !

— Et fatiguant… Je vais rester ici pour me reposer.

— Fais attention à toi.

 

Le froid  était beaucoup plus fort que dans le reste du comté, de la neige entourait les abords du château. Ils entendirent un cri. Arrivés sur les lieux, Mesraël prit peur car c’était sa fille qui se trouvait là. La jeune sorcière avait la cheville prise sous un rondin de bois. Le paladin se servit de son épée pour dégager la malheureuse. Une fois celle-ci sauvée, il se leva et s’épousseta. La jeune sorcière essaya de marcher mais ressentit une vive douleur.

— Merci, je m’appelle Morgiann, je me rendais au château. Pouvez-vous m’aider ?

— Bien sûr, mais pourquoi êtes-vous dans cet endroit ?

— Mon imprudente petite fille a voulu suivre un joli chaton rose et bleu et maintenant elle est prisonnière de ce traitre de Chester.

Oriane aida la sorcière à marcher. Le paladin semblait mal à l’aise Ils arrivèrent près de l’entrée d’un souterrain qui débouchait sous une colline. La sorcière leur indiqua que c’était un raccourci leur permettant d’éviter la rencontre avec plusieurs monstres. Le jeune super héros fit confiance à sa nouvelle amie et entra dans le souterrain. L’endroit ressemblait fortement à une pyramide. Comme si cette dernière avait été ensevelie sous la colline. Des hiéroglyphes plus qu’inquiétants étaient dessinés sur les murs. On y voyait des momies faire travailler de force de jeunes humains à la construction de pyramides, ou encore des vampires boire du sang humain en leur compagnie. Oriane commençait à regretter son choix et restait sur ses gardes.

— Vous êtes sûr du chemin ?

— Oui je connais bien l’endroit. C’est un raccourci connu, cela nous fait éviter la neige. C’est un peu sombre mais je déteste le feu et les torches.

— J’ai hâte d’être arrivé.

— Au prochain croisement, nous tournerons à droite et nous serons rapidement rendus.

 

En effet, peu de temps après, les trois voyageurs se retrouvèrent dans une grande salle avec un trône et, au milieu, une cage  avec la jeune sorcière aux cheveux blancs. Son chant évoquait une tristesse sans fin. Oriane se précipita pour délivrer l’oiseau.

 

Mais elle entendit la porte se refermer et une voix sépulcrale :

— Ma jeune amie, vous venez chez moi sans y être invitée et en plus vous voulez libérer ma boite à musique ?

Les aventuriers  virent une femme, habillée de blanc, portant un long manteau fait de neige.

— Vous ne pouvez pas garder cette enfant en cage.

— Pourquoi pas ?

— C’est ma descendance ! Hurla le paladin.

— Intéressant ! Mon petit bossu, nul besoin de garder cette apparence, tu m’as bien aidé.

Oriane vit la jeune sorcière se transformer en un horrible nain bossu. Cela lui avait paru bizarre que la jeune Mertille ne salut pas sa grand-mère à leur arrivée.

— Je suis la reine des Neiges, la vraie, celle par qui le froid arrive, pas cette sotte de princesse.

Alors que Mesraël restait interdit, Oriane prit une torche au mur avec précaution et enflamma le sinistre nabot qui poussa un cri de douleur avant de disparaître en cendres.

— Vous allez me le payer. Toi, continue de chanter ! Je m’occuperai de toi plus tard.

Une armée d’hommes en noir apparut. Ils ne semblaient pas être en vie mais absorbaient l’amour et la joie qui les entouraient.

— Ce sont des esprits du néant, il va falloir se battre pour que nous puissions passer ! Hurla le paladin.

Oriane se jeta dans la bataille. Elle allait être submergée quand un rugissement se fit entendre et Robin apparut.

 

La sinistre reine, sentant la défaite arriver, prit le chapeau du nain dans les cendres et s’enfuit par un passage secret.

— Gente damoiselle, libérez moi, je peux vous aider, cria la jeune sorcière.

—Tu en es sûre ?

— Je ne suis pas que sorcière !

— J’arrive Mertille, répondit Mesräel, en anéantissant les sbires du néant sur son passage.

Une fois la jeune fille libérée, les vêtements de celle-ci se déchirèrent et elle prit la forme d’un loup noir, aussi grand que Robin. La balance s’était inversée et les sbires du néant semblaient perdus sans leur chef. Leur déroute fut rapide.

Les aventuriers sortirent de la pyramide. Mertille reprit sa forme humaine.

— Je ne me souvenais pas que les homme-garous gardaient leurs vêtements, déclara Mesraël.

— Je suis aussi une sorcière, ne l’oublie pas, grand papi. Et maman a appris ce sortilège à papa pour qu’il évite de se retrouver tout nu à chaque transformation. D’ailleurs, il y en a une qu’il faut que je transforme à nouveau.

Mertille fit une série de gestes avec ses bras et ses doigts et, soudain, le lion reprit la forme de Morgiann, la fille de Mesraël.

 

— Chester t’a eue, mamie ?

— Oui ! Ce chat de malheur ! Comme on travaillait du même côté, il connaît mon vérinom. Qui sont ces gens ?

—  Les aventuriers qui m’ont aidé à te sauver.

— Merci, jeunes gens. Excusez-moi de ne pas rester mais les sorcières et les paladins n’ont jamais fait bon ménage.

Oriane sentit la tristesse du Paladin l’envahir.

Morgiann siffla et son balai apparut. Elle l’enfourcha et repartit vers les marais.

 

Ce fut l’heure des au-revoir.

— Tu ne vas pas te faire gronder ? demanda Oriane.

— Ne t’inquiètes pas, j’ai sauvé mamie, maman ne va pas punir une bonne action.

— Pourquoi elle ne s’est pas souvenue de nous ?

— Car j’ai vu que tu n’étais pas prêt, grand papi. Je lui ai effacé quelques souvenirs en la retransformant.

— C’est le nabot qui t’a trompé ? Demanda Oriane.

— Oui. J’ai cru avoir délivré mamie, je serais plus prudente à l’avenir.

Elle siffla et son balai apparut.  Puis elle enlaça le paladin.

— Grand papi, je sais que tu as une guerre à mener, mais les trois femmes veulent ton retour. Quand tu seras prêt, mais tarde pas trop…

— Promis Mertille ! je commencerai par ton arrière-grand-mère.

Le câlin fini, Mertille prit la direction des marais.

 

Oriane, comprenant la peine de Mesraël, s’effaça. Il avait une vie, une famille à retrouver et lui, le paladin qui était prêt à affronter le Néant en combat singulier, en avait un plus dur à affronter : La vie.

 

 

 

 

 

 

 

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